Et soudain, Gustavo m'a réveillé...


Dimanche 21 Janvier 2018 09:09 - écrit par Laurent Mazué

C'est au terme d'une bonne sieste, en admirant un "derby de l'Atlantique" riche en passes ratées et intentions de jeu proche du néant, que Gustavo Poyet a officiellement été nommé entraîneur des Girondins.



Gustavo Poyet à Brighton (2009-2013)

Il est 19h lorsque M.Hamel siffle enfin la fin de Nantes-Bordeaux (0-1). On se dit alors que c'est la meilleure action de la rencontre. Car honnêtement, le "derby de l'atlantique" comme on l'appelle, fut une bonne purge comme notre bonne vieille Ligue 1 est toujours capable de nous offrir.

Pourtant, j'étais pressé de me mettre dans mon canapé pour suivre une rencontre qui s'annonçait fort intéressante. D'un côté un Nantes pragmatique et solide, cinquième du championnat, et coaché par un "Mister" que j'apprécie particulièrement. De l'autre un Bordeaux malade, qui doit absolument se rassurer avant l'arrivée d'une nouvelle tête pensante. J'avais en plus misé sur ce match pour écrire mon premier billet d'humeur sur jeunesfooteux.com...

C'est peu dire que plus les minutes défilaient, plus je reportais à Lyon-Paris mes envies d'écriture. Impossible de tirer quelque chose d'un tel florilège d'actions mortes-nées. La faute à des nantais sans-idées, incapables de garder le ballon, statiques... Une impression de déjà-vu me diriez-vous, mais pas sous les ordres de Ranieri: cette équipe ressemblait furieusement à celle de Girard. Autant dire un cauchemar.

Les bordelais se sont eux rassurés, mais les interrogations sont toujours là. L'heure n'était bien évidemment pas à dérouler un jeu flamboyant, mais à retrouver confiance et solidité balayées depuis le "set & match" perdu au Parc des Princes à l'automne (6-2). Le contrat est rempli et c'est bien l'essentiel. 

Le community manager des Girondins, homme du match.

Mais je dois bien l'avouer, mon attention au match fut toute relative: entre deux soupirs (l'un pour une passe d'un nantais à un coupain imaginaire, l'autre pour une action en solitaire de Malcom en mode Neymar du très très pauvre), j'avais la tablette dans les mains, les yeux rivés sur les sites d'infos. Les girondins devaient annoncer l'identité du courageux qui doit reprendre le flambeau de Gourvennec.

Les noms cités par Canal + (Prud'homme, Wilmots, Mihajlovic) ne faisaient pas de mystères: au diable le beau jeu et les tactiques élaborées, place au style "guerrier-meneur d'hommes" qui pose ses attributs sur le terrain.

Et puis le community manager bordelais est intervenu. Tel un Men in Black cherchant à nous faire oublier le calvaire auquel on venait d'assister, il nous annonça la nomination de Gustavo Poyet. Et celui-là on ne l'avait pas vu venir.


Garra Charrua, Manager of the Year et... viré en direct à la BBC.

Pour les moins de vingt ans, Gustavo Poyet c'est d'abord un milieu de terrain des années 90 qui a compté. Ce n'était certes pas une star mais sa grinta a marqué l'histoire des clubs ou il est passé, notamment Chelsea et Saragosse. Il a d'ailleurs remporté la Coupe des coupes avec ses deux clubs. Il a également connu une expérience en France, à Grenoble, même si ça remonte au tout début des 90's. Il représente dans mes souvenirs l'archétype de l'uruguayen qui possède en lui la fameuse "Garra Charua" cet esprit guerrier qui caractérise les joueurs qui ont porté le maillot de la Celeste (avec qui il remporta la Copa America en 1995). Un mec qui ne lâche rien? C'est bien le profil recherché par le board girondin.

Son passé d'entraîneur est néanmoins plus nébuleux. En tant qu'ancien joueur de Premier League, il a naturellement eu sa chance en Angleterre. Dans les divisions inférieures tout d'abord: c'est à Brighton & Hove Albion qu'il débute et qu'il aura d'ailleurs ses meilleurs résultats... en troisième division (League One). Arrivé à la hâte en novembre 2009 avec son ancien coéquipier de Tottenham Mauricio Taricco comme adjoint, il sauve le club de la relégation, puis est sacré champion de League One dès l'année suivante. Elu manager of the year de cette division en 2011, il emmene les Seagulls (les mouettes...) en mai 2013 jusqu'aux demi-finales de play-off pour l'accession à la Premier League, perdues face à Crystal Palace. 

Mais on le sait tous, le football est un univers impitoyable: alors qu'il est consultant pour l'émission ultra populaire Match of the Day (l'équivalent de Jour de Foot), il apprend son licenciement en direct, par communiqué de presse. Pas classe.

 


Cet awkward moment devenu légende de la tv britannique ne va pas sonner le glas de sa carrière. En octobre 2013, il est même nommé manager de Sunderland, alors en Premier League. Sa première année, est un succès. Il sauve le club de la relégation et l'envoie en finale de la League Cup, éliminant au passage Manchester United en demi-finale. Une prolongation de contrat de deux ans plus tard, il est viré sans ménagement en mars 2015 après quelques déculottées monumentales. 

D'ailleurs, l'expression "viré sans ménagement" est malheureusement celle qui caractérise aux mieux ses expériences suivantes: six petits mois à l'AEK Athènes, six autres au Bétis Séville et un projet "sportif" de dix mois en Chine au Shanghai Shenhua, ou il gagne tout de même la Chinese Cup, mais est viré pour une 11ème place en Super League, avec pourtant des joueurs comme Tevez ou Demba Ba dans son effectif...

Hormis sa propension à reprendre les équipes en cours de saison pour les sauver de la déroute, "Gus" (son surnom en Angleterre) n'a pour le moment pas d'autres références notables, que ce soit en terme de palmarès, ou de philosophie de jeu. Un rôle de pompier de service en somme, qui est peut-être  le facteur qui a fait pencher les décideurs bordelais en faveur de l'uruguayen... Il arrive en tous cas au Haillan, avec dans ses valises son adjoint de toujours, Mauricio Taricco, et surtout Fernando, idole de l'équipe championne de France en 2009. De quoi donner un crédit certain auprès des supporters...